Histoire & Fondateurs
Sainte Jeanne-Elisabeth et Saint André-Hubert
Saint André-Hubert Fournet (1732 – 1834) – Fondateur des Filles de la Croix
« Ce livre appartient à André-Hubert, bon garçon, qui ne sera jamais ni moine, ni prêtre »…
écrira enfant, sur la 1ère page de l’un de ses livres, celui qui deviendra plus tard ‘’le bon Père’’, puis St André Hubert Fournet, en réponse peut-être à sa mère qui n’aura eu de cesse, connaissant son bon fond, de lui répéter : « Un jour, mon bon André, tu seras prêtre. Tu monteras à l’autel et tu prieras pour ta mère ».
Ainsi sa mère aura-t-elle semé, puis laissé toute la place à Dieu.

9ème d’une famille de 10 enfants André-Hubert grandit au milieu de ses frères et sœurs, dans l’amour de ses parents. Enfant insouciant, rieur et exubérant, qui préfère le jeu au travail, il devient pensionnaire au collège de Châtellerault, où il est apprécié de ses camarades nous dit-on, pour son joyeux entrain et sa franchise.
Après des études classiques, il étudie le droit pendant un an, mais semble écrire si mal qu’il ne peut prétendre à la magistrature. Sans consulter personne, il s’engage alors dans l’armée et se présente dans son costume militaire, chez son oncle, curé de Saint Pierre de Maillé, berceau de la famille Fournet.
L’accueil est sec :
« Votre visite se trompe d’adresse …. Je n’ai pas de neveu dans l’état militaire »….
A 22 ans, il décide de rentrer au séminaire. D’abord vicaire, André-Hubert est nommé curé à Saint Pierre de Maillé après le décès de son oncle.
Si les témoignages laissent pour la suite apparaître André-Hubert comme un bon prêtre, force est de constater que s’il aime à recevoir, c’est avec un certain luxe. Au point que son oncle prêtre puisse en arriver à lui prédire qu’à se comporter ainsi il finirait en enfer.
Un jour où il attend du monde autour d’une table richement préparée dans la salle à manger située au premier étage du presbytère ; dans l’escalier, un bruit de pas le surprend. C’est un mendiant qui demande l’aumône.

Monsieur le Curé est embarrassé :
« Je n’ai pas d’argent …. »
« Comment çà, pas d’argent ? … lui réplique le mendiant … Mais votre table en est couverte »
Sa mère aura semé,… et Dieu travaille avec le temps .
La parole du mendiant sera pour André-Hubert comme une révélation, source de sa conversion. Parole de Jésus-Christ. Ainsi dans les jours qui suivront en arrivera-t-on à le retrouver en pleure, prosterné sur les dalles de l’église.
Par la parole d’un mendiant dont on ne sait rien, ni du nom, ni des origines, Jésus Christ est entré dans le cœur du bon Père.
1789 … La Révolution éclate …..
Le serment constitutionnel étant exigé des prêtres, André-Hubert refuse de se soumettre à la Constitution Civile du Clergé. Prêtre errant, sans paroisse, sans église ni demeure, il doit désormais se cacher car sa vie est en danger.
Confiant en la Providence, il prend le chemin de l’exil vers l’Espagne, devenue terre d’accueil pour nombre de prêtres français.
De 1792 à 1797, André-Hubert est réfugié à Los Arcos, petite ville de Navarre, mais ses paroissiens de Saint Pierre de Maillé semblent à ce point lui manquer qu’il lui parait entendre leur voix. Il décide alors de revenir en France ; une France où ne semble guère régner l’accalmie espérée. Où les prêtres réfractaires sont encore et toujours menacés.
Obligé de célébrer l’Eucharistie clandestinement, tantôt dans un endroit, tantôt dans un autre, par une nuit de 1797, dans une grange mal éclairée, André-Hubert voit entrer une jeune demoiselle, châtelaine des environs ; laquelle traverse l’assemblée principalement composée de paysans et de métayers. Tandis que l’on s’écarte pour la laisser passer, André-Hubert intervient vivement :
« Croyez-vous, Mademoiselle, que je vais laisser, pour vous entendre, ces mères de famille, ces pauvres paysans venus de plusieurs lieues ? »
Humblement, la jeune fille répond au prêtre :

« Mon Père, j’attendrai … Il suffira que vous consentiez à m’entendre … après eux … » et elle attendit de longues heures …
Dans cette grange dite des Marsyllis, c’est la rencontre avec Élisabeth Bichier des Ages…. et le début d’une grande histoire.
Décédé le 13 Mai 1834, le Bon Père sera canonisé en 1933.
Sainte Jeanne-Élisabeth Bichier des Ages (1773 – 1838) -Fondatrice des Filles de la Croix

Élisabeth, née le 5 Juillet 1173 non loin du Blanc (36), au Château des Âges. Baptisée le jour même, Élisabeth grandit au milieu de ses trois frères. L’éducation à la foi chrétienne est assurée par Madame Bichier sa mère, qui trouve à travers tout, dit-on, l’occasion d’enseigner à ses enfants la présence de Dieu : prière, partage, hospitalité….
En 1789, lors de la Révolution, la famille Bichier se disloque. Laurent, l’aîné de la fratrie faisant le choix d’émigrer et Monsieur Bichier Père tombant gravement malade. Il s’éteindra le 17 janvier 1792.
La Constitution civile du Clergé, votée par l’Assemblée est cause de dissensions religieuses dans le pays et très vite, l’incidence du départ de Laurent retombe sur toute la famille. Madame Bichier et sa fille, suite à leur refus de prêter allégeance à toutes les tracasseries du comité révolutionnaire seront un temps emprisonnées…L’intelligence et le savoir faire d’Elisabeth au moment de leur procès permettront leur libération et la restitution des biens de famille.
Un jour de 1797, un vieux serviteur parle à Élisabeth d’un curé ; un vrai curé catholique qui célèbre la messe en cachette, au risque de sa vie.
Une messe devant être célébrée dans la ferme des Marsyllis, à une quinzaine de kilomètres de Béthines où se trouve à avoir déménagé la famille, Élisabeth ressent comme un besoin de se confesser ; de communier.
Accompagnée du serviteur, Élisabeth se met en route dès la tombée de la nuit. Après plus de trois heures de marche, ils arrivent enfin au but ; la grange est pleine de monde et le prêtre, revêtu des ornements sacerdotaux s’apprête à célébrer l’Eucharistie sur une table recouverte d’un linge blanc.
Après la messe, le prêtre va s’installer à côté d’un confessionnal de fortune placé dans un recoin où les gens du pays qui désirent se confesser s’approchent.

Élisabeth se confessera la dernière, presque à l’aube. Peut-être confiera t-elle au prêtre cette nuit là son désir absolu de don à Dieu et pensera t-elle avoir trouvé une réponse…
Mais le Père lui dit qu’il ne fallait pas penser au cloître – il n’y en avait plus en France – mais au service du Seigneur à travers les « petits et les pauvres. »
Lorsque le calme fut revenu, elle partit pour apprendre la vie religieuse dans un couvent de Poitiers avec sa servante Marianne, elle y reçut du Père l’injonction de retourner sur le champ à Béthines.
Béthines où deux amies, puis trois (Madeleine, Véronique et Anne) les rejoindront bientôt.
Ainsi deviendront-elles les 5 premières filles de la Croix.
Déménageant très vite à St Pierre de Maillé, elles prononceront leurs vœux de pauvreté, chasteté et obéissance en Février 1807 au château de Molante.

Un matin, au retour de la messe, Sœur Élisabeth semble entendre des cris étouffés dans les broussailles. Guidée par les plaintes, elle se fraie un chemin, dans les épines.
Au pied d’un chêne, se creuse une grotte assez vaste. Une vieille femme dévorée de plaies et de vermine gémit. Il faut l’héberger, la soigner et l’aider. La cancéreuse (comme on l’appellera) est soignée jour et nuit mais mourra malgré tout dans les bras d’Élisabeth sans que l’on ait jamais connu ni son nom ni son histoire.
Pour la communauté la grotte de la cancéreuse deviendra dés lors un lieu de pèlerinage.
La maison de St Pierre devenant à son tour trop petite, les sœurs s’installeront (1820) non loin de là, à La Puye dans ce qu’il reste alors des bâtiments du prieuré fontevriste du XIIème siècle laissé à l’abandon suite à la Révolution.
En 1815, Élisabeth devant subir une longue intervention chirurgicale s’est rendue à Paris où les dames des cercles mondains lui rendaient régulièrement visite ; lui demandant à ce que soit crée une présence religieuse de la congrégation dans la région parisienne.
De nombreux appels seront ainsi lancés de toute part pour l’éducation des enfants, le soin des malades et des personnes âgées. C’est l’époque des fondations, et Sœur Élisabeth ouvrira alors de nombreuses communautés à travers toute la France.

Sœur Élisabeth, malgré un tempérament robuste, affaiblie par la maladie et la souffrance entrera dans la gloire du Christ le 26 août 1838. Elle sera canonisée en 1947.
L’installation à la Puye
Bien que St Pierre de Maillé puisse légitimement apparaître comme le berceau de la congrégation, le siège de la conversion du bon Père et là où s’unirent à Dieu les 5 premières sœurs ; pour Élisabeth, celle-ci prend en réalité naissance dés 1804, dans sa demeure familiale de Béthines.
Ainsi l’écrira t-elle dans la lettre qu’elle adressera au Pape Pie VIII en 1829 ; précisant que, « depuis 25 ans le diocèse de Poitiers possède une congrégation consacrée à la Croix ».
Béthines, berceau de l’Institut …
… mais la distance de 4 lieues séparant Béthines à Maillé apparaissant bien trop importante, les sœurs se rapprocheront du bon Père et arriveront au lieu-dit de Molante en mai 1806.
Si la foi est aussi vive sur ce coteau de Maillé qu’elle le fut dans la terre de Canaan, pourquoi les Filles de la Croix ne se multiplieraient-elles pas comme les enfants d’Abraham ?
ainsi priait la Bonne Sœur.
A Molante, la foi est en effet si vive que de partout des jeunes sont attirées par cette petite communauté qui commence à rayonner.
Le Bon Père envoie des sœurs dans les paroisses alentours. De petites communautés seront ainsi fondées à La Bussière, Paizay, Coussay les Bois, Ste Radegonde…
A La Puye distante de 8 km, ce sont des sœurs itinérantes qui viennent de Maillé, restent deux jours et logent chez une certaine … Marie Pichot, ancienne novice fontevriste.
